Comprendre l’effet d’entourage : cannabinoïdes, terpènes, flavonoïdes

La notion d’effet d’entourage est de plus en plus employée dans l’univers du CBD et du cannabis. Elle devient d’ailleurs un critère de choix par rapport au vaste panel de produits dérivés. Plus la recherche avance et plus on découvre le potentiel et les propriétés variées des nombreux composés chimiques du chanvre. Alors est-ce que l’union fait la force ? Découvrons cela à travers diverses études scientifiques sur la synergie des molécules, cannabinoïdes, terpènes, flavonoïdes.

Qu’est-ce que l’effet d’entourage ?

Il existe de nombreuses variétés de cannabis. Chacune présente des caractéristiques spécifiques au niveau des senteurs, saveurs et effets. 

Celles-ci sont influencées par la composition de la plante de chanvre, qui contient de nombreuses substances chimiques différentes. Parmi ces composés, on retrouve plus d’une centaine de cannabinoïdes. Les plus connus sont le THC (tétrahydrocannabinol), CBD (cannabidiol), CBG (cannabigérol), CBN (cannabinol), CBC (cannabichromène)…  Mais le végétal renferme également des terpènes et flavonoïdes. Le premier est un hydrocarbure qui contribue l’odeur, l’arôme et la couleur. Le second est un métabolite secondaire responsable de la pigmentation. Chacun d’entre eux apporte des propriétés qui leur sont propres.

En 1998, les professeurs israéliens Raphael Mechoulam et Shimon Ben-Shabat font une découverte révolutionnaire, qui offre une nouvelle voie à la science. Ils développent alors l’hypothèse que des produits biologiques inactifs peuvent augmenter l’activité d’endocannabinoïdes primaires.

La notion d’effet d’entourage voit alors le jour. Celle-ci désigne la synergie des divers composés du cannabis, par laquelle ils interagissent les uns avec les autres pour augmenter les effets et offrir des propriétés spécifiques.

Dans le contexte du CBD, celui-ci s’avère donc potentiellement plus efficace en combinaison avec d’autres molécules de la plante. Ainsi, les produits dérivés sont différenciés en 3 genres : full spectrum (spectre complet), broad spectrum (spectre large) ou isolat. Le premier correspond à une extraction complète des éléments chimiques du chanvre. Le second est similaire au premier, à la seule différence que le THC est absent. Le dernier équivaut à une forme pure avec un seul principe actif isolé.

Les diverses études autour de la synergie des composés du cannabis

A ce jour, divers chercheurs à travers le monde se sont intéressés à l’effet d’entourage provoqué par la synergie des molécules du chanvre. De surcroît, ils ont démontré l’existence de ce phénomène chimique.

Les recherches du Dr. Ethan Russo

Le psychopharmacologue Ethan Budd Russo est connu internationalement pour ses nombreuses études sur le chanvre. Plusieurs concernent d’ailleurs l’effet d’entourage.

En 2010, il expérimente la synergie potentielle du cannabis et les effets d'entourage phytocannabinoïdes-terpénoïdes.

Le THC est au centre des investigations depuis 1964. Mais depuis peu, les contributions synergiques du CBD à la pharmacologie ont également été prouvées. D’autres phytocannabinoïdes (THCV, VBG, CBC…) présentent aussi des vertus thérapeutiques supplémentaires. Mais le cannabis contient également d’autres agents phytothérapeutiques, comme les terpénoïdes : limonène, α-pinène, linalol, myrcène, β-caryophyllène, oxyde de caryophyllène, nérolidol et phytol. Ces molécules sont relativement puissantes et peuvent affecter l’organisme animal et même humain. Elles disposent de propriétés uniques qui sont susceptibles de participer à l’effet d’entourage.

Les travaux soutiennent l’idée que la sélection de chémotypes de chanvre riches en phytocannabinoïdes et terpénoïdes fournit une complémentarité, qui peut accroître les utilisations cliniques. Les indications dans les troubles, tels que la dépression résistante au traitement, l'anxiété, la démence, la toxicomanie et une panoplie de troubles dermatologiques, sont les plus prometteurs.

L’abstract conclut qu’un avenir meilleur pourrait voir le jour grâce à des recherches plus approfondies sur l’effet d’entourage et la phytochimie du cannabis.

En 2019, Ethan B. Russo décrit la synergie botanique, par laquelle un extrait de plante de chanvre entière est plus efficace qu’un cannabinoïde purifié. Il explique qu’une molécule dominante est soutenue par d'autres dérivés végétaux et substances inactives, pour une activité pharmacologique maximale. Il en déduit d’ailleurs que "la plante fait mieux" que toutes génies génétiques.

Les futurs traitements au cannabis

En 2019, à l’institut des sciences végétales d’Israël, il est question des futurs médicaments à base de cannabis avec des normes médicales adaptées. Pour ce faire, les chercheurs soulignent que le profil moléculaire complet devra être défini. Des associations de composés devront également être expérimentées pour obtenir des qualités thérapeutiques supérieures, grâce à l’action synergique.

L’écrit, publié en mars 2021 dans PubMed, passe en revue toutes les preuves de l’effet d’entourage potentiel des cannabinoïdes pour lutter contre la douleur. Celui-ci conclut sur les avancées scientifiques prometteuses pour le traitement de la douleur. De futurs essais cliniques pourront montrer l’efficacité supérieure du spectre complet du chanvre, avec moins d’effets indésirables. Ces nouveaux médicaments constitueront une nouvelle option, plus favorable, par rapport à d’autres traitements, comme les opioïdes.

L’effet d’entourage face au cancer

Divers travaux ont été effectués, en 2018, pour démontrer la synergie des éléments chimiques dans le traitement du cancer.

Le Dr Meiri dirige le laboratoire de biologie du cancer et de recherche sur les cannabinoïdes au Technion Israel Institute of Technology. En 2018, il intervient à la célèbre conférence annuelle Cannmed qui regroupe les grands esprits de la science du cannabis. Il y raconte ses études sur le cancer et les preuves de l’effet d’entourage dans le cadre de cette maladie. Mais il va plus loin en expliquant qu’en biologie ce n’est pas si simple. Ce n’est pas le nombre de molécules, comme on pourrait le penser, qui fait la force. Il constate, lors de ses tests sur les cellules cancéreuses du colon, que ce n’est pas l’extrait entier, mais quelques éléments spécifiques qui activent différents récepteurs. D’après lui, les recherches à venir devront définir le rôle de chaque substance chimique et leur liaison à quel récepteur pour obtenir des bienfaits thérapeutiques.

Le cancer du sein reste la deuxième cause de décès chez les femmes, bien que de nouveaux traitement aient vu le jour et amélioré les pronostics. Il a été découvert que les cannabinoïdes produisaient des réponses anti-tumorales dans différents types de cancer. Mais la majorité des expérimentations ont été pratiquées avec un principe actif pur et souvent du tétrahydrocannabinol.

Les investigations menées à la prestigieuse université Complutense de Madrid comparent l’action antitumorale du THC pur par rapport à une préparation à base de cannabis. Ce remède contenait d’autres cannabinoïdes, terpénoïdes et flavonoïdes. Ceux-ci présentent également des vertus thérapeutiques prometteuses et participent à l’effet d’entourage. Les scientifiques ont constaté une puissance accrue avec un spectre complet pour produire une activité antitumorale. Selon eux, celui-ci pourrait faire partie de l’arsenal thérapeutique pour traiter le cancer du sein.

La même année, une autre étude est réalisée à Israël pour le cancer colorectal. Celle-ci identifie l’interaction synergique entre les composés dérivés du chanvre pour une action cytotoxique contre les cellules cancéreuses et les polypes du côlon.

Effet anticonvulsivant avec une synergie de molécule

A l’institut de technologie d’Israël, Technion, en 2018, une équipe de chercheurs mentionne l’importance d’une analyse complète des phytocannabinoïdes. Pour cela, ils ont évalué les propriétés anticonvulsivantes de divers extraits de cannabis contenant le même taux de CBD. Les différentes préparations n’ont pas produit les mêmes résultats. Des interactions synergiques se sont ainsi révélées entre différents cannabinoïdes.

Les terpènes associés aux cannabinoïdes dans les troubles de l’humeur

Les troubles de l’humeur font partie de nombreuses pathologies psychiatriques. Il a été démontré que certaines huiles essentielles, comme celle de lavande officinalis, pouvaient apporter une aide, par exemple pour l’anxiété. Il est également suggéré que le système endocannabinoïde détient un rôle important dans l’anxiété, les troubles bipolaires et la dépression. Son activité peut être modulée par des cannabinoïdes exogènes.

L’abstract publié, en février 2020, dans PubMed passe en revue la littérature sur les effets des terpènes couplés à des cannabinoïdes pour le traitement de troubles psychiatriques.

Celui-ci suppose que l’association des deux éléments améliore les actions stabilisatrices de l'humeur attribuées notamment au tétrahydrocannabinol et au cannabidiol.

Le texte précise la nécessité d’études complémentaires pour expérimenter davantage le potentiel thérapeutique de l’ajout de terpènes au traitement CBD avec ou sans THC. Cet effet d’entourage avec des produits naturels ouvre la voie à de nouveaux traitements des troubles de l’humeur et de l’anxiété. Qui plus est, les effets secondaires et risques considérables liés aux traitements conventionnels pourront être évités. 

L’effet d’entourage apporté par les terpènes

Les scientifiques, du Collège de médecine de l’Université de l'Arizona, étudient, en 2021, l’effet d’entourage apporté par les terpènes de cannabis sativa. Leurs résultats suggèrent que ceux-ci peuvent stimuler l’activité des cannabinoïdes et que cette synergie peut ainsi améliorer leurs propriétés thérapeutiques.

La chromatographie comme outil d’analyse 

En 2022, à l’Institut de Chimie et Métabolisme des Médicaments de l'Université de Buenos Aires, les professeurs mettent en avant la chromatographie comme outil d'analyse du cannabis sativa L. Ceux-ci soulignent, que de nos jours, il est prouvé que les qualités thérapeutiques de la plante reposent sur une synergie entre divers composés. La chromatographie est donc une méthode de choix pour la détermination des cannabinoïdes et autres métabolites secondaires comme les terpènes et les flavonoïdes. Elle permet d’identifier les différents chémotypes de la plante et de comprendre le rôle de chaque molécule à cet effet d’entourage.

Les possibilités offertes à la science avec l’effet d’entourage sont vastes. Mais des recherches plus approfondies sur la phytochimie du cannabis sont nécessaires. Celles-ci pourront mieux aiguiller les travaux futurs pour le traitement de certaines maladies avec ce trésor pharmacologique. 

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